Au Niger comme dans la majorité des autres pays d’Afrique subsaharien, les maladies tropicales négligées font des victimes parmi les populations les plus vulnérables (6oo millions de personnes touchées en Afrique selon l’OMS). En vue de leur éradication au Niger le gouvernement et ses partenaires mettent en œuvre des politiques de santé publique dont les résultats commencent à apporter leurs fruits. Pour faire le point, Échos du Niger s’est entretenu avec le Docteur Alambey Aminatou, coordinatrice du programme nationale de lutte contre les maladies tropicales négligées.
Si l’OMS a identifié vingt maladies tropicales négligées à travers le monde, au Niger, 14 de ces maladies sont présentes et considérées comme très morbides. Selon Dr Alambey « elles sont classées en deux catégories dont les MTN à chimiothérapie préventive qui sont au nombre de cinq à savoir le trachome, l’onchocercose, les helminthes transmis par le sol, la filariose lymphatique et la schistosomiase. En ce qui concerne la seconde catégorie elle regroupe des MTN dont la prise en charge s’effectue au cas par cas. Il s’agit de la lèpre, la rage, la gale, le ver de guinée et la morsure de serpent » indique la coordinatrice du PNLMTN qui souligne que chaque année, des médicaments sont distribués gratuitement dans les districts concernés par ces maux. Ces efforts permettent au Niger de s’illustrer dans la lutte contre les MTN.
De façon détaillée, les avancées enregistrées par le pays concernent principalement les MTN à chimiothérapie préventive « si on prend le cas de la filariose lymphatique, avant il y avait 54 districts qui faisaient face à cette maladie en 2007. Aujourd’hui, un seul district poursuit le traitement. Pour le trachome, 62 districts sur les 72 que compte le pays étaient endémiques en 2007. Actuellement, seul 4 districts poursuivent le traitement en 2023 » a indiqué la coordinatrice.
Quant à l’onchocercose, cette maladie a été pratiquement éradiquée, faisant du Niger le premier pays d’Afrique à avoir réalisé cet exploit. Le ver de Guinée n’est plus aussi un problème de santé publique au Niger. Pour Alambey Aminatou, ces avancées sont le fruit de la multiplication des campagnes de traitement de masse, notamment la distribution de millions de doses de médicaments chaque année dans les districts concernées par ces maladies. Les populations ont ainsi accès à ces médicaments gratuitement. Il y a également la pratique de la chirurgie qui permet aux malades déjà atteint de recouvrer la santé. Le dernier volet consiste à des séances publiques de sensibilisation pour amener les populations à prendre conscience de ces maladies et à s’approprier la lutte contre ces dernières. Toutefois, « ce sont des maladies provoquées par une absence d’hygiène. Malgré la distribution des médicaments, le manque d’hygiène risque de ruiner toutes les avancées » s’inquiète Dr Alamabey.
L’hygiène rime généralement avec accès à l’eau potable et l’assainissement de l’environnement. Et sur ce plan au Niger, si des progrès restent à faire, le pays a connu beaucoup d’amélioration sur le plan de l’hydraulique. Le Niger a un sous-sol riche en eau douce, mais il n’en demeure pas moins que beaucoup restent à faire pour satisfaire les besoins des populations, particulièrement en milieu rurale où les infrastructures d’hygiène sont insuffisantes.
En 2020, selon les données du ministère de l’hydraulique et de l’assainissement, 49% de la population urbaine bénéficie d’un service optimal d’eau potable, contre 2% pour les populations rurales. Les chiffres récents ne sont pas disponibles.
Beaucoup de spécialistes déplorent un investissement insuffisant dans le secteur de l’eau qui a un impact négatif sur le développement du pays et entrave entre autres la lutte contre les maladies tropicales négligées. C’est pourquoi nombre de partenaires se tiennent aux cotés de l’État afin de contribuer à renverser cette tendance négative pour la cause des MTN.
Les efforts de Speak-Up Africa aux côtés du PNLMTN…
Le Dr Aamabey a souligné la nécessité d’une mobilisation générale afin que ces maladies tropicales négligées soient éliminées au Niger d’ici à 2030 conformément aux ambitions de l’OMS et aux Objectifs de Développement Durable (ODD). Dans cette optique elle n’a pas manqué de souligné et apprécier la contribution de Speak Up Africa une des plus importantes organisations panafricaines qui œuvre dans la lutte contre les MTN. « Speak-Up Africa nous assiste sur plusieurs volets dans cette lutte particulièrement dans les activités de levée de fonds et à la mise en place de la commission multisectorielle de lutte contre les maladies tropicales négligées » fait savoir la cordinatrice du PNLMTN. L’ONG basée à Dakar se positionne ainsi comme un partenaire de taille dans cette lutte.
Le 2 février dernier, à Abu Dhabi Speak Up Africa s’est associé à Reaching the Last Mile, une autre ONG pour annoncer une initiative commune en vue de renforcer leurs actions en faveur de l’élimination des maladies tropicales (MTN). Cette initiative avait pour but de renforcer l’engagement des jeunes et des associations de jeunes pour mieux lutter contre les MTN au Niger ainsi qu’au Sénégal. Elle fournira des financements ainsi qu’un encadrement et des ressources aux organisations dirigées par des jeunes œuvrant pour l’élimination des MTN dans leurs communautés.
Les participants recevront des subventions d’une valeur totale de 250 000 dollars soit environ 153 millions de francs CFA et des formations pour renforcer leur capacité à s’engager dans les espaces politiques et décisionnels.
Il s’agit aussi de créer un grand réseau d’organisations de jeunes au Sénégal et au Niger dans le but d’amplifier leur travail et de leur permettre de partager leurs connaissances et leurs solutions. 10 associations de jeunes seront sélectionnées au Niger et au Sénégal.
En septembre 2022, Du 5 au 9 septembre, le Programme National de Lutte contre les Maladies Tropicales Négligées (PNLMTN) du Niger, avec l’appui de Speak Up Africa a organisé un atelier d’élaboration du plan national de plaidoyer pour la lutte contre les MTN 2022-2025 à Dosso en présence du secteur public, d’organisations de la société civile et de partenaires techniques et financiers.
Cet atelier a permis de doter le PNLMTN d’un nouveau plan national de plaidoyer afin d’harmoniser la programmation et la mise en œuvre des stratégies et activités de plaidoyer et de garantir l’alignement de toutes les activités de plaidoyer avec le plan stratégique national 2017-2021.
Avec Speak Up Africa et l’engagement des autorités nigériennes, le pays semble sur la bonne voie pour faire des MTN de lointains souvenirs dans un futur proche.
Youssouf Sériba
Cette production est réalisée avec l’appui de Speak-Up Africa dans le cadre du programme ‘’Lines for Impact’’
